Notules des derniers titres goncourables 2021 par Pierre B.

Les Editions de Minuit, 2021

La fille qu’on appelle  

Tanguy Viel  

Son poing, c’est tout 

Ex boxeur en déshérence, Max veut pour cette fois aider sa fille débarquant d’une autre ville qui cherche un logement, voire un travail. Alors, il sollicite son maire dont il est le chauffeur. D’emblée, dès la première entrevue avec ce notable local Laura tombe dans un imparable piège sexuel. Jeune, surprise et désarmée elle est incapable d'affronter la pression qu’impose cet homme de pouvoir local. Le scenario est d’une sale banalité frôlant la caricature, cette méchante mésaventure étant de sur croit décrite en une forme d’oralité qui s’égare parfois aux confins d’un non-sens foutraque, l'auteur s’ingéniant à massacrer la langue en un style BFM - s’il est possible ici de discerner un style - n’est pas Céline qui l’envie. 

Au fil des pages - heureusement cet opus a l’élégance de sa concision - l'agacement pour la forme l’emporte sur un fond ne pouvant que susciter la révolte face à une maltraitance toujours aussi présente, actualité des faits oblige, celle de l'emprise sexuelle ordinaire exercée par les hommes usant du moindre pouvoir. (l’affaire Darmanin, entre autres, restant en mémoire). En ce qui concerne la chute, on ne saurait déflorer l’intrigue tant l’issue est banale : La fille est consternée, son boxeur aussi. Poing final.  

Pierre B. 

INCIPIT:

Personne ne lui a demandé comment elle était habillée ce matin-là mais elle a tenu à le préciser, qu’elle n’avait pas autre chose à se mettre que des baskets blanches mais savoir quelle robe ou jean siérait à l’occasion, idem du rouge brillant qui couvrirait ses lèvres, elle y pensait depuis l’aube. Elle, assise à la terrasse de l’Univers, sur la grande place piétonne au cœur de la vieille ville, derrière elle on pouvait lire en très grosses lettres sur le haut mur de pierres les mots HÔTEL DE VILLE, plus haut encore le drapeau tricolore comme un garde endormi reposant dans l’air tiède. Bientôt elle franchirait le grand
porche et traverserait la cour pavée qui mène au château, anciennement le château donc, puisque depuis longtemps transformé en mairie, et quoique pour elle, dirait-elle, c’était la même chose : qu’elle ait rendez-vous avec le maire de la ville ou le seigneur du village, dans sa tête ça ne faisait pas de différence – même fébrilité, même cœur un peu (...)